10.

   Les chapons. Des filles sans malice le désignent du menton en s’essuyant les mains. Il est criblé de taches, de pointes lumineuses ; tout son corps lui échappe, a des gestes nigauds — et ce bouillon épais, brunâtre, qui déborde les yeux, le pille, escamote la gorge… Il n’a pas tout à fait le sérieux requis ; les boules de coton gonflent ses joues. Il va pleurer aussi. Les lampions coulent, la cire brûle le front des badauds. Une averse de grêle meurtrit les seins des matrones, trempe les bouffettes, les bérets. Sur l’estrade, le nain, enfin, délace sa braguette, la coque rouge. Dans la morosité et le café tiédi, dans les éclairs timides et laiteux, l’adolescent ose toucher l’épaule de son frère. Ils regardent le gnome, muet, grotesque ; la chèvre qu’on amène. Même les ivrognes font silence. Alors, quand le nabot s’enfonce dans la bête, muette, consentante, une habituée des foules, le jeune homme craintif, sans bégayer, dit :
— Messieurs, à mon tour !

 

 
 
. . .