38. (Se) bouger, malgré la lourdeur du corps. Hisser, extraire petits membres, rhizomes. Beaucoup de fatigue, de volonté. Le corps est une masse laiteuse, avec des zones plus sombres (le dessin des organes) dont certaines palpitent lentement, d’autres montrent des contractions plus ou moins régulières. D’autres sont immobiles. Ce sont celle dont on pourrait dire qu’elles sont les plus menaçantes. Retrouver ses esprits, fourbir ses courtes pattes, cela prend un temps excessif. Ce mince (incommensurable) effort nous occupe tout le jour. Bien sûr on en oublie très vite le but de ce déploiement ; cela incite à renoncer. On sait au moins qu’on ne mourra pas de faim.


39. Je veux regarder dehors cela m'attire. Mais je n’ose guère (pas du tout, en fait, hormis quelques trémoussements rapidement réprouvés dont j’ai honte, bien sûr, mais qui me procurent une sorte de petite joie illicite incompréhensible, mais fort exquise). La fenêtre est tout proche et parfois il y a du bruit. Jamais de voix. Des pas. Le vent dans les arbres. Et des bruits sur le toit (des présences ; peut-être des pigeons). Et aussi le grincement de la chaise sur laquelle je me tiens, digne — la plupart du temps.

40. Sous la peau les viscères crispés. Cela durcit. Une constipation de tout son être. Evacuer cela serait un immense soulagement. Bien sûr on en mourrait mais : bon débarras. Laisser ça derrière soi, honteusement dissimulé dans un coin sous une vieille couverture. Mourir léger, propre, diaphane.