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  Pierre Bourdieu

 
   

sociologue énervant

 
   

 

Des textes sur et autour
 

 
       

 

 

 

 
 

 
 

 

 

  

JEAN BRICMONT
in Le Monde Diplomatique, LES LIVRES, IDÉES, février 2002, p.30.
SCIENCE DE LA SCIENCE ET RÉFLEXIVITÉ. - Pierre Bourdieu, Raisons d'agir, Paris, 2001, 240 pages, 9 euros.

Dans cet ouvrage, Pierre Bourdieu publie son dernier cours au Collège de France. II revient sur un thème qu'il avait déjà abordé dans un article de 1975 : celui des bases sociologiques de la connaissance scientifique. Pierre Bourdieu s'oppose à la fois à divers courants sociologiques réductionnistes, comme le « programme fort », associé aux noms de Barry Barres et David Bloor au Royaume-Uni et de Bruno Latour en France, auxquels il reproche d'ignorer la spécificité du champ scientifique, ainsi qu'à une approche purement épistémologique de la science, qui, selon lui, ne fait que reproduire la version idéalisée que les agents ont de leur propre pratique.

 La spécificité du champ scientifique vient, selon Bourdieu, du fait que les seules personnes ayant la compétence pour juger la valeur du travail d'un scientifique sont, à cause de la technicité de ce champ, ses pires concurrents. Pierre Bourdieu applique cette analyse à sa discipline, la sociologie (c'est ce qu'il appelle la réflexivité), ainsi qu'à sa propre trajectoire. Agréable à lire, ce livre fourmille de références historiques, sociologiques et philosophiques.


SCIENCE DE LA SCIENCE ET RÉFLEXIVITÉ.

THOMAS LEPELTIER, Sciences Humaines 126, avril 2002, p.51.
Cours au Collège de France, 2000-2001
Pierre Bourdieu, Raisons d'agir, 2001, 240 p., 9 .

eut-on soumettre la science à une analyse historique et sociologique qui ne vise nullement à relativiser la connaissance scientifique en la réduisant à ses conditions historiques? Oui, répondait Pierre Bourdieu dans ce cours au Collège de France. Et il entendait le montrer scientifiquement. II s'en prenait ainsi à tous ceux qui, regroupés derrière ce qu'on appelle « la nouvelle sociologie des sciences », affirment que l'on ne peut expliquer le succès des théories scientifiques autrement que par des luttes d'intérêts ou des facteurs sociaux.

P. Bourdieu ne considère pas pour autant que « le discours scientifique est un reflet direct de la réalité ». II estime en effet que la « science est une construction », mais une « construction qui fait émerger une découverte irréductible à la construction et aux conditions sociales qui l'ont rendue possible ». Quant à ce processus qui permettrait aux productions scientifiques d'échapper à leur enracinement social et historique, il ne serait autre selon P. Bourdieu que celui mis en œuvre par les institutions scientifiques : la sélection des chercheurs les plus compétents et la soumission constante des hypothèses et raisonnements à ceux qui sont les plus à même de les critiquer étant ce qui permettrait aux meilleurs arguments de l'emporter. Bref, c'est « la nature sociale de la science qui est responsable de son objectivité ».

L'idée n'est pas nouvelle, mais n'en mérite pas moins d'être étudiée de près. C'est d'ailleurs ce que l'auteur prétend faire puisqu'il répète inlassablement qu'il étudie scientifiquement la science. Mais en lieu et place de toute étude qui chercherait à être ne serait-ce que précise et rigoureuse, ce cours se contente d'un vague rappel critique de quelques thèses de la nouvelle sociologie des sciences, de quelques considérations sur la pertinence pour l'étude de la science des notions de champ et d'habitus, et enfin d'un plaidoyer pour la sociologie de la sociologie (ce qui nous vaut une auto-socio-analyse).

II n'y a point de science là-dedans, serait-on tenté de dire. Ce serait mal comprendre P. Bourdieu : le fonctionnement de l'institution universitaire (scientifique, dit P. Bourdieu) étant le garant de la scientificité des discours qui en émanent, et l'auteur ayant occupé dans cette institution une des places les plus prestigieuses, ce qu'il disait ou écrivait était par définition scientifique!
   

  

 

 

 

Pierre Bourdieu

     
 

   
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