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  Pierre Bourdieu

 
   

sociologue énervant

 
   

 

Décès de Pierre Bourdieu :(
 

 
   

 


Pierre Bourdieu

  Le champ politique. Elections présidentielle, européennes...
 Coluche ou rien.




Par Didier HASSOUX, Libération, le vendredi 25 janvier 2002.

 


 

i l n'aurait sans doute pas aimé. Unanimes ou presque, les responsables politiques ont rendu, hier, une série d'hommages vibrants à Pierre Bourdieu. Un flux dithyrambique de droite à gauche. Jacques Chirac a refait le coup de la «fracture sociale» en saluant le combat du «militant de la pensée» au service «de ceux que frappe la misère du monde». Lionel Jospin s'est rappelé à sa gauche en louant «un engagement fort contre la mondialisation libérale et ses dommages culturels et sociaux». Jean-Pierre Chevènement a tenté, une fois encore, de se distinguer de ses deux principaux rivaux à la présidentielle en remarquant que «dans le triste univers de la pensée unique, il aura incarné le souffle de la pensée critique».

Partis «caducs». Il n'aurait pas aimé parce qu'il n'aimait pas les partis politiques. Il s'en méfiait autant qu'il aimait la politique. Pour preuve : il participe activement à l'embryon de campagne présidentielle de Coluche en 1981. Lorsque le comique remise ses plumes et son cul, le sociologue stigmatise les professionnels de la politique qui ont «refusé à ce casseur de jeu le droit d'entrée, que les profanes lui accordaient massivement». «Pierre ne croyait qu'à la société civile, analyse Annie Pourre, cofondatrice de Droit au logement (DAL) et proche de l'intellectuel. À l'époque, il voyait en Coluche son meilleur représentant. Il a toujours considéré que les partis politiques étaient caducs.»

Ce qui ne l'a pas empêché de les fréquenter. Même sans le savoir. Durant l'hiver 1995, il devient, à la fois, le symbole et le théoricien des mouvements sociaux qui secouent le pays. Son nom apparaît en tête d'une pétition d'éminences de la société civile contre le «plan Sécu» d'Alain Juppé, alors Premier ministre. Deux personnes organisent la révolte de papier : Jacques Kergoat, membre de la LCR, et Didier Leschi, proche de Chevènement. Bourdieu n'y voit que «le champ du social» qui investit le «champ du politique». Et pas une mainmise de la gauche critique.

Refus. Dans la foulée, il organise des «Etats généraux du mouvement social» qui n'aboutiront pas politiquement. Même si, en 1999, d'aucuns poussent le sociologue à affronter les électeurs. Une liste «d'une gauche de gauche» aux Européennes est envisagée. Bourdieu refuse de la parrainer.

Un scénario à l'identique s'était produit à l'occasion de la présidentielle de 1995. L'intellectuel apparaissait alors dans tous les combats des «sans». Il participe à la fondation d'Agir contre le chômage (AC!), s'engage aux côtés du DAL. Annie Pourre, Didier Leschi, Christophe Aguiton (AC et LCR) se souviennent que sa candidature à l'Elysée est alors envisagée. Mais Bourdieu décline. Ironie du sort, ses travaux sur La Misère du monde nourriront le discours d'un autre candidat à la présidentielle. Jacques Chirac lui doit beaucoup.
   


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