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  Guy-Ernest

 
  

Debord

 
 
pointj.gif (73 octets) Debord
   
 Jean-Pierre George :
Les situationnistes, Instructions pour une prise d'armes.
 
 

Le magazine littéraire, n°14 - Janvier 1968.

 
 

 

Un fantôme hante la culture : l'Internationale situationniste. La lecture de "La Société du Spectacle", de Guy Debord, et du "Traité de savoir-vivre à l'usage des jeunes générations", de Raoul Vaneigem - ces livres viennent de paraître - doit permettre de se faire une idée plus précise de ce groupe et des théories qui l'animent.

- Henri Lefèbvre, théoricien marxiste de la "Critique de la vie quotidienne", en parlait récemment en ces termes ("Position : contre les technocrates", 1967, éd.Gonthier) :
"Les premiers, les situationnistes ont aperçu les implications et conséquences de "la critique de la vie quotidienne". De leur propre aveu, ils doivent beaucoup à cet ouvrage dont le premier volume (Introduction) parut en 1946. Presque seuls, pendant une période difficile, ils préservèrent, en précisant sa portée, le mot d'ordre essentiel de la révolution : changer la vie. Ils ont défendu la théorie de l'aliénation en cherchant à l'affiner, et sans se prévaloir d'un humanisme philanthropique. Ils l'ont défendue contre les attaques. Parmi les premiers, ils ont saisi l'importance des problèmes urbains et d'une critique de l'urbanisme actuel comme idéologie. Ensuite, sur ces bases, ils ont édifié un dogmatisme qui ne le cède à aucun autre en malveillance sectaire, en susceptibilité. Or ils ne proposent pas une utopie concrète, mais une utopie abstraite. Se figurent-ils vraiment qu'un beau matin ou un soir décisif, les gens vont se regarder en se disant : "Assez ! Assez de labeur et d'ennui ! Finissons-en !" et qu'ils entreront dans la Fête immortelle, dans la création des situations ? Si c'est arrivé une fois, le 18 mars 1871 à l'aube, cette conjoncture ne se reproduira plus. Serait-ce trahir la révolution que de dire et de rappeler les interrogations laissées en suspens par les grands révolutionnaires : "Qu'est-ce que la période de transition et de mutation ? En quoi consiste-t-elle ?"

- Au reste, voici comment les auteurs présentent eux-mêmes leurs livres.

- Guy Debord : La Société du Spectacle, 176 pages, Buchet/Chastel éd.
"Voici le premier livre théorique situationniste. Les situationnistes forment un mouvement assez secret, mais dont on parle de plus en plus. Le ralliement des représentants des étudiants de Strasbourg à ces thèses, dont Le Monde pouvait écrire qu'elles étaient "d'un extrémisme difficilement dépassable", a fait scandale. On a souvent vu l'influence des situationnistes dans le mouvement "provo", bien qu'ils aient condamné la naïveté publicitaire de cette agitation prématurée. Leurs idées sont actuellement au centre des courants de contestation les plus avancés qui se forment en Angleterre et en Amérique.
"Guy Debord, qui est le directeur de la revue" Internationale situationniste", donne dans cet ouvrage difficile à classer les bases de la critique nouvelle qui partout commence à remettre en question la société moderne. La fonction des mass media, l'urbanisme, l'échec du mouvement ouvrier, la dégradation de la vie en contemplation d'une production aliénée, s'y trouvent considérés dans une perspective unifiée. Ce livre ne peut manquer de surprendre, en ce qu'il contredit toutes les croyances de la gauche actuelle. La domination méthodologique du mouvement de la pensée moderne depuis Hegel et Marx est ici orientée, on s'en avise à la lecture, vers un but tout autre : la révolution. (Guy Debord, né à Paris en 1931, est le directeur de la revue "Internationale situationniste". Egalement réalisateur de quelques films hors circuit.)"

- Raoul Vaneigem : Traité de savoir-vivre à l'usage des jeunes générations, 290 pages, Gallimard éd.

"Le Traité de savoir-vivre à l'usage des jeunes générations" s'inscrit dans un courant d'agitation qui n'a pas fini d'intriguer les sociologues et autres salariés de l'ordre établi. Partant d'une critique globale du vieux monde, il s'attache à dégager de la tradition du refus et de la contestation contemporaine les nouvelles lignes de force révolutionnaires.
"L'histoire offre aujourd'hui aux rêveries et aux passions de la subjectivité une chance de se réaliser dans la subversion totale de ce qui les nie. C'est pourquoi chacun est désormais embarqué dans un choix pratique entre la vie et la survie, choix qu'il manifeste en paralysant les mécanismes du pouvoir ou en s'y soumettant. La lutte contre la dictature de la marchandise se confond, en le radicalisant, avec le combat contre la coalition d'intérêts hostiles au projet de l'homme total : le pouvoir hiérarchisé, la religion, l'idéologie, le travail, les techniques de conditionnement, l'oppression policière et ses versions humanisées.
"Dans le même mouvement, elle fonde les conditions d'un renforcement des possibilités de création individuelle et de "l'autogestion généralisée". Le Traité est un mémento à l'usage des partisans de la Longue Révolution.
"Raoul Vaneigem, né en 1934 à Lessines, dans le Hainaut, licencié en philologie romane, a été professeur de lettres. Il se consacre depuis 1960 aux activités de l'Internationale situationniste, mouvement qui existe depuis 1957 et qui groupe des partisans à Paris, Londres, au Danemark et à New York."

- Les situationnistes ont coutume de dire que leurs idées sont "dans toutes les têtes". Allez-y voir vous-mêmes, si vous ne voulez pas les croire."

   

 
Une petite clope   
   

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