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 "Danger travail"

 

Documentaire
Mieux vaut ne pas travailler
qu'être mal employé
Angélique SCHALLER, La Marseillaise, Samedi 11/05/2002.

 

  

Le dernier documentaire de Pierre Carles a été présenté à la fac Saint Charles, vendredi dernier. 93 minutes pour dire le refus d'un travail subi.

L faisait du porte-à-porte pour vendre des salons. Jusqu'à ce jour de juin 1998 où, dans un village des Pyrénées Orientales, il va fourguer un ensemble canapé-fauteuil de 40.000 F (60.000, prêt compris) à un couple gagnant quelque malheureux 5.800 F par mois. Ce sera la goutte d'eau. Depuis, il est au chômage. Il n'a plus travaillé. Il ne veut plus jamais travailler.

Vendredi dernier, quatre organisations marseillaises (1) ont présenté le dernier documentaire de Pierre Carles (auteur de Pas vu, pas pris ou La sociologie est un sport de combat), Christophe Coello et Stéphane Goxe, intitulé Danger Travail. « L'événement » a rempli aux trois quarts le grand amphi de la fac Saint-Charles.

Durant les 94 minutes que dure le documentaire, des reportages sur l'embauche à Domino Pizza, sur le fonctionnement d'une boîte de télé-marketing, sur une action de chômeurs dans un supermarché, une vieille publicité pour les Prud'hommes... Rythment les témoignages d'une dizaine de personnes racontant pourquoi et comment elles ont arrêté de travailler.

Il ne s'agit pas d'affirmer une péremptoire fin du travail, mais de valoriser des réactions singulières face à la montée du précaire, du partiel et autres modalités de la négation la plus cynique du travailleur. « Ils nous ont foutu dehors par la grande porte et voudraient que l'on revienne par la petite, acceptant le temps partiel, les durées limitées et les salaires réduits », rapporte notamment un ouvrier espagnol.

Les dix témoins refusent désormais le travail subi. Ils s'investissent, s'engagent, socialisent... Travaillent mais différemment. Ils expliquent leur liberté, leur indépendance, racontent leur choix entre « le temps et l'argent », rapportent le bonheur d'un temps maîtrisé, avouent les « choix drastiques dans leur consommation » et assument l'association dérangeante des termes de chômeurs et heureux.

Il s'agit là d'un premier volet. Chaque cassette achetée permettra de financer Volem rien foutre al pais. Ce premier volet de 94 minutes ne devait, initialement, pas en dépasser 15. Il était là pour servir d'annonce, appâter pour la suite. Mais la richesse des témoignages en aura décidé autrement. D'où quelques manques. Car finalement, on ne sait que très peu de choses sur ces gens. Si certains expliquent vivre avec les 2.600 F du RMI, ce sera la seule information pratique. Des enfants, une famille ? Le propos serait peut-être plus difficile à assumer avec quelques petits à charge. Le documentaire n'en reste pas moins extrêmement bien construit. Il ouvre la réflexion sur cette question, interroge le rapport entre travail et consommation.

1) Les antimilitaristes du RIRe, AC! 13, PLPL et Sud étudiants.