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[Attention danger : Travail ! Interview optimisée du réalisateur Pierre Carles]
la fourmi rouge (blogue), 22/02/2007

  

  

L’approche de la sortie en France de Volem rien foutre al païs , le nouveau film de Pierre Carles et compagnie est l’occasion de revenir sur sa première partie : le documentaire culte Attention danger Travail. Le temps d’une chronique, d’une brève rencontre avec l’auteur et d’une expérience virtuellement concrète : fixez vous-même le prix de votre ticket de ciné-net !

Cette année la glorification du travail se portera fièrement dans une déclinaison de coloris chatoyants permettant les combinaisons les plus audacieuses. De la « valeur travail » de Mme Royal à « la France qui travaille » de M. Sarkozy en passant par le plein-emploi exigé par les verts, les rouges vifs et les bruns, Paris donne le ton : c’est le grand retour du tissu de mensonges, pardon, de Vichy !


Une chronique flexible et compétitive.

Raison de plus pour s’attarder sur une création indémodable de la Maison PC&Co coutumière des réalisations collectives sans concession et à contre-courant des modes. Une compagnie artisanale qui a su construire sa renommée malgré -certains diront : grâce à- sa censure presque systématique (ce malgré commande), par les grandes chaînes de prêt à penser tels Canal+, TF1, etc. (1) Véritable empêcheur de tourner en rond du PAF, le collectif a l’art de mettre son pif, son micro et son objectif là où on ne l’attendait surtout pas !
Dans Attention danger : Travail réalisé en ’03 et plusieurs fois remanié depuis, Pierre et les siens lèvent le voile sur les non-sens du système productiviste. Un patchwork efficace fait d’immersions édifiantes -parfois désopilantes- dans le monde du travail flexible et de rencontres instructives avec des déserteurs de la guerre économique.
Ce premier chapitre se focalise sur la résistance individuelle face au du dogme du travail. À (re)voir sans modération. Le second, comme nous le verrons prochainement, complétant de manière constructive cette sévère critique s’attarde lui sur des alternatives collectives concrètes et filmées avec talent. À ceux qui ne connaissent pas encore Pierre Carles il est tentant de le présenter comme un Michael Moore français. En précisant que là où Michael à tendance à arrondir les angles, Carles les affûte. Là où la voix off de Moore vous explique ce qu’il faut penser, celle de Pierre vous donne brièvement une information pour vous laisser ensuite tirer vos propres conclusions...Mais que fait la police ?!
L’avant première inter-galactique de Volem... au cinéma Nova à Bruxelles, fut l’occasion d’une rencontre avec le réalisateur...


Une interview en flux tendu de Pierre Carles.

Insistant sur le fait que c’est au travers des luttes sociales que le monde du travail, les citoyens ont pu améliorer leurs conditions d’existence, certains reprochent aux critiques du travail de se tromper de combat, de lâcher la proie pour l’ombre, voir de faire le jeu d’un capitalisme en mutation. Que leur répondriez-vous ?

Pierre Carles : Pourquoi l’un exclurait-il forcément l’autre ?


Attention danger travail
semble ignorer la contradiction qui peut exister entre le discours des chômeurs heureux à qui vous donnez la parole dans le film et le fait que s’ils peuvent se permettre cette expérience c’est aux frais de ceux qui travaillent encore...

Pierre Carles : Faux. Les allocations chômage sont versées en France par l’UNEDIC, un organisme qui mutualise les cotisations salariales et patronales. Or les "déserteurs du marché du travail" d’Attention danger travail ont, pour la plupart d’entre eux, participé à la "guerre économique" avant de déserter. Ils touchent donc ce que l’on pourrait appeler une retraite d’ "ancien combattant" après avoir cotisé pendant une partie de leur vie. Ceux qui touchent le RMI (revenu minimum d’insertion) sont payés par l’État et non pas par les autres salariés. En France, l’essentiel du budget de l’État provient de la TVA (taxe sur la valeur ajoutée) à laquelle n’échappent pas les Rmistes dès lors qu’ils consomment.

Voyez-vous l’allocation universelle comme une alternative crédible au système productiviste ?

Pierre Carles : "Alternative crédible" ? Une alternative n’a pas, de mon point de vue, être "crédible". Impossible de le savoir par avance. Il faut tenter le coup, viser des utopies pour voir si ça marche ou pas. Tu te vois dire aux Communards de Paris le 25 mars 1871 ça ne marchera jamais votre truc ?

Enfant lorsque l’on vous posait la question rituelle : « Tu veux faire quoi quand tu seras grand ? » quelle était votre réponse ?

Pierre Carles : On ne posait pas trop la question. Si on me l’avait posé, j’espère que j’aurais répondu quelque chose comme "Je ne veux pas être grand". Ou bien, même si ça peut paraître un peu nunuche : "J’aimerais réussir à garder une âme d’enfant quand je serai grand."

Comment se gère une réalisation collective, partage des rôles ou ménage à trois ?

Pierre Carles : On faisait le ménage à tour de rôle mais aussi parfois ensemble...

Vous n’allez pas sans savoir que plusieurs versions de vos films circulent gratuitement sur Internet. Est-ce de votre plein gré ?

Pierre Carles : Pour dire la vérité, nous ne sommes pas à l’origine de la mise en ligne de nos films sur internet. Mais nous n’y sommes pas non plus opposés. Nous ne poursuivons pas les pirates. Notre position par rapport au piratage est assez simple : s’il est parfaitement légitime de se procurer gratuitement des films de productions riches, déjà largement amortis, il est plus délicat d’agir de la sorte avec les productions pauvres. Beaucoup de films peuvent être piratés sans problème vu qu’ils sont déjà plus que remboursés en salles de cinéma ou lors de leur passage à la télévision. Ce n’est pas le cas des nôtres qui sont fabriqués, tenez-vous bien, sans aucun financement de la télévision tout en réussissant néanmoins à sortir dans les salles de cinéma. C’est peut-être pour cela qu’il sont singulièrement libres ou originaux. On compte donc essentiellement sur les entrées en salles de cinéma et les ventes Dvd pour financer nos productions indépendantes.

Effectivement vu que vous et vos camarades faites passer Moore pour un scout avec un pins du Che demain n’est pas la veille de votre diffusion sur le petit ou les grands écrans classiques...

Pierre Carles : Ou que nous obtiendrons des subsides importants. Ce sont des films relativement chers à fabriquer, on passe en général quatre ans à les faire, ce qui explique que je sois mitigé sur les diffusions gratuites. Et nous ne sommes pas les seuls dans ce cas... Même si à la base l’intention, la volonté de diffuser est bonne, j’en suis conscient. Mais j’aimerais aussi pouvoir vivre de mon travail et tourner d’autres films sans avoir à demander la permission aux gens de télévision, comme le font la plupart de mes collègues réalisateurs.

Et si les internautes qui le souhaitent pouvaient vous soutenir en versant un don, un prix libre d’un coup de clic ? Approuveriez vous l’idée ?

Pierre Carles : Ce n’était pas prévu mais pourquoi pas ? Soyons fous !

Une expérience inédite à haut rendement subversif !

Vous l’aurez compris l’idée est de (tenter de) démontrer que les internautes réceptifs à un tel discours ne sont pas des ingrats et de tester la capacité du cinquième pouvoir à se mobiliser pour soutenir concrètement une production, une information autonome. Qui n’en demandait pas tant ? Raison de plus !
Vous avez ou allez visionner un ou plusieurs films de Pierre Carles&Co. disponibles gratuitement via Internet, pourtant vous souhaitez manifester, concrétiser votre soutien aux réalisateurs, leur permettre de poursuivre ?
Cher téléads bien planqués dans vos conapts, activista.be vous propose une solution pragmatique mais néanmoins évolutionnaire, sans le ® ! :
Faites un don d’un clic solidaire et achetez votre ticket de ciné-net à prix libre...(cliquez ce lien pour afficher la page de soutien flexible et virtuellement concret).
D’autres alternatives pour concrétiser votre soutien, des extraits des films en ligne et d’autres liens sont disponibles sur cette page...

À votre bon cœur camarades pronétaires et bonne sieste !



(1) voir « Pas vu, pas pris ! » sur les rapports entre les médias et le pouvoir.