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HAPPY DAYS.

 
 

 
Daté 12/07/2000.

 
 

 

inutile d’attendre la fin du monde. Les masochistes chrétiens ou les crétins apocalyptiques —rappelons que chrétien = crétin— en sont pour leurs frais. La fin de leur monde a déjà eu lieu. Reste que le meilleur des mondes, celui du capitalisme en version new age, a du mal à gérer l’ordure qu’il engendre —l’ordure, c’est l’argent et ce qu’il excrète— avec obligation pour ceux qui n’ont rien de fouiller l’ordure pour trouver de l’argent. Cela est arrivé loin de chez vous. Près de Manille-Philippines —autant dire nulle part !

point gris Des sous-humains qui fouillent la merde pour récolter le tétanos et des boîtes de coca. La colline d’ordures qui s’effondre et, au total, des dizaines de morts. Morts dans les excréments d’une économie résolument optimiste et marchande. Il n’y a d’ailleurs pas eu d’accident à proprement parler, d’après le journal commercial Le Monde. L’étonnant est que l’accident n’ait point eu lieu avant.

point gris Ces gens du tiers-monde sont vraiment des arriérés ou des nuls ! Pourquoi diable ne créent-ils pas des start-up ? Ordures.com par exemple. Cela pourrait concurrencer une bonne partie des media occidentaux. De quoi faire sauter des parts de marché à Paris Match, la presse de caniveau et à la quasi totalité du paysage audiovisuel français. Car le journalisme « moderne » se nourrit de l’ordure, tout comme la fiente des mouettes produit du guano ! si le prolétaire est condamné à vendre sa force de travail, le prolétaire-journaliste, même bien payé, fait pire : il prostitue sa conscience, ou ce qui lui en tient lieu, toujours au service de cette vieille putain qui a pour nom opinion publique.

point gris Ça sent quoi la conscience d’un journaliste ? Le mazout s’il est payé par Total-Fina, ou le guano s’il émarge à l’inénarrable télévision publique française (le secteur privé, comme d’habitude, ne valant guère mieux). Sans parler de la presse régionale qui bat tous les records de servilité. Les laquais et les valets sont parfois plus immondes que les maîtres. Le maître tue, en toute bonne conscience — enfin, une certaine forme de bonne conscience, celle du tueur. Le valet, celui affecté aux relations publiques, est doublement coupable. Savoir et ne rien dire, mais aussi mentir pour que rien ne change. Double mensonge : par omission et par obligation — déontologique, il va sans dire !

point gris Inutile de préciser qu’un travail d’investigation du côté des « Smokey mountains » ou de Lupang Pangako risquerait de nuire au moral des troupes ! Aux stipendiés, thuriféraires du néo-libéralisme qui, face toute critique de leur job de merde, n’ont qu’une réponse : mais toi, d’où tu parles ? Réponse : les cramés de l’oléoduc du Nigeria n’ont plus le droit de parler ! Alors, on parle pour eux ! Parce que la vie, dans certaines zones de cette putain de planète, vaut moins que le prix d’un litre d’essence vendu au marché noir. Et que pour toi, tête de porc qui t’affiches dans la presse locale ou ailleurs, le prix de l’essence s’intègre à tes notes de frais. Pas de quoi troubler la quiétude de ta digestion. Cette quiétude qui suit les repas avec les notables et les puissants. Et où il est de bon ton de se moquer de la nullité des autres — histoire de préserver la sienne. Celle de la gauche caviar ou de la droite foie gras, bien explosés dans leur connerie végétative. Celle de l’engourdissement post-prandial, qui, à l’instar d’un quelconque ministre, leur fait éructer de fortes sentences. Aussi fortes que leurs pets pourris.

point gris Conneries du genre « la Mondialisation est un fait (Fabius) ». Inclinons-nous devant les faits ! Ou, dans un genre encore plus foutraque, l’argent c’est l’universalité. Et à ce titre, toute hérésie face à la religion de l’argent ne saurait que décevoir Wall Street, Tokyo et Tel Aviv ! Dans le monde des laquais, un bon pauvre est un pauvre mort, étouffé sous les ordures ou enterré dans le silence, quand ce n’est pas le mépris. Un mort du tiers-monde meurt trop loin pour révulser la conscience morale des classes moyennes occidentales. Et même s’il crame sous le pétrole en flammes, on sait qu’après tout le feu purifie !

point gris Comme tout le monde le sait « l’argent n’a pas d’odeur ». Celui du pétrole, des trafics ou des narco-dollars. Enfin, soyons raisonnables, le bonheur, en version néo-libérale et images de synthèse, est à portée de la main ! Toute autre vision du monde est une vision « orientée ». Ce que ne démentirait pas le gouvernement monégasque ( ?) et les quinze courageux magistrats français en poste dans cet État croupion, pour lesquels, on l’a vu récemment, le traitement de l’argent sale n’a rien à voir avec celui des détritus ! Car ça ne pue pas l’argent, bien au contraire. Il est évident que bien noté et fortement rémunéré, un juge sait se montrer impartial ! De même qu’un valet sait complimenter son maître.

point gris Le bonheur est à portée de main, disent-ils ? À portée d’un jet de salive ! 

 
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