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Les textes de B.D.M. en rtf
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  J'ai vu "Pas vu..."

 
  bdm  Le 17 février 1999.  
     
   

Lorsque j’ai enfin réussir à voir " Pas vu pas pris " de Pierre Carles [il y a deux mois de ça, mais les chroniques passent après le travail alimentaire…] j’avais déjà en tête les diverses accusations de malversations et de mauvaise foi émises à l’encontre de l’auteur : elles sont assez vite balayées à la vision de l’objet.

pointg.gif (57 octets) La principale, formulée par Hector Olbak, camarade de jeu de Carles, avançait que l’extrait sur lequel le film se bâtit ne serait qu’une conversation anodine, que l’auteur l’aurait délibérément masqué, notamment en n’incluant pas l’entrevue avec Claude Angeli du Canard qui meaculpe à ce sujet. Olbak me surprend défavorablement, soit c’est un âne soit il fait la bête : à aucun moment la conversation amicale surprise entre Léotard et Mougeotte, le politique et l’homme de media, n’est présentée comme un scoop : sur sa fin, on y décèle bien une petite amorce de lobbying en faveur de TF1 – mais Mougeotte qui gère une chaîne à l’époque outrageusement balladurienne a-t-il besoin de faire pression sur l’un des plus chauds partisans du levantin ! ? Ce que montre cette séquence c’est la connivence entre hommes de media et politiques, pas plus mais c’est déjà beaucoup : ces gens se connaissent (" ils sont amis de 30 ans " rappelle Villeneuve défendant son patron), ont essuyé leurs culottes sur les mêmes bancs universitaires, se tutoient, se fréquentent et fréquentent les mêmes gens, les mêmes lieux, se marient entre eux, ont les mêmes références, la même culture ; ils font partie des élites, des classes dominantes, point. C’est une évidence pour sûr, un fait social, on ne peut leur reprocher ; ce que l’on peut leur reprocher, en revanche, c’est de chercher à tout prix à masquer cette connivence objective, de faire comme si de rien n’était, en construisant la fiction du détachement et de l’objectivité. Carles utilise en appoint de sa démonstration une séquence d’un reportage d’une consoeur montrant la familiarité d’avant entrevue entre Mme Sinclair-Strauss Kahn et Laurent Fabius, on suppose que Mme Okrent-Kouchner ne serait pas en reste mais comment snober un ami qui dîne à votre table ? On peut aussi se remémorer une séquence du doc " Le Monde, la campagne présidentielle 95 " où l’on voit le fielleux félon Sarkozy chercher sciemment à installer une connivence avec deux journalistes qui s’en défendent, par le tutoiement, les clins d’œil complices sur l’air du " vous et moi le savons bien ".

pointg.gif (57 octets) Carles s’arrête sur cette question : pourquoi masquer cette connivence objective ? Il ne va pas plus loin, il fait semblant de ne pas s’interroger sur ce qu’elle pourrait signifier en matière de traitement de l’information mais ses interlocuteurs qui font les imbéciles comprennent fort bien la mise en danger de leur pouvoir de tigres de papier qu’implique cette interrogation, se débattent connement et les manitous de l’information s’affichent comme des pantins ridicules aux capacités argumentatives fort limitées, c’est le moins !

pointg.gif (57 octets) Ainsi, le film est-il passablement réjouissant car il mène un petit jeu de massacre vengeur des têtes parlantes et à peine pensantes télévisuelles qui se réfugient dans de miteuses arguties déontologiques, des auto-proclamations de " professionnalisme ", l’appel au " goût du public "… Si Chancel et Blachas s’en sortent avec les honneurs, De Carolis a l’air d’une tanche, Benyamin fait le faux cul (ma femme ne peut plus le supporter depuis, elle grogne chaque fois qu’il apparaît dans la lucarne, comme cette fois où le jt de la 2 nous le rediffuse servant la soupe à Pinochet, persuadé de bien faire, croyant qu’on peut interroger un dictateur en exercice avec " neutralité " !), Villeneuve est plus traîneur de sabres fachisant que jamais…
Karl Zéro démarre avec un capital de sympathie que je ne lui accordait pourtant pas connaissant ses accointances dans la grande bourgeoisie conservatrice, puis, on le voit s’enferrer progressivement dans le piège de sa chaîne, c’est lui qui explique à Carles la différence entre le Canal + d’aujourd’hui et celui de 1984, et il finit en Dark Vador essayant d’attirer le naïf Pierrot du côté obscur de la Force…
Canal + apparaît pour ce qu’elle est, une chaîne qui vend de la fausse impertinence à un public de jeunes à la coule et de csp+ (tout en programmant avec une belle constance les pires films de beaufs, rappelons-le…). Un de ses pseudo-journalistes mène dans le film une pseudo-enquête sur le rejet du sujet de Carles par ses patrons : il produit –sous la dictée ou en toute bonne fois ?- un sujet de strict auto-justification du point de vue de ses maîtres… Toutes ces vedettes jouent à fond la carte du copain-copain-nous on n’est pas comme les autres.

pointg.gif (57 octets) Pour finir, ajoutons que Carles est fort drôle dans un rôle de faux naïf un rien butté, voix-off hésitante et persifleuse : le film se présente d’emblée comme discours, Pierrot va nous raconter l’histoire d’un sujet qu’il a voulu faire et qui a été rejeté par Canal+, il nous présente les péripéties de l’affaire, les pièces du dossier (conversations téléphoniques, entrevues filmées, documents papier et même petites malversations de l’auteur) : c’est du grand art parce que, à rebours de ses contradicteurs justement, l’auteur ne prétend pas à la fausse objectivité mais construit son discours comme éminemment personnel, ce qu’est obligatoirement le discours journalistique mais qu’il persiste à masquer pour se parer de ses nippes de " quatrième pouvoir ".

 
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